chapitres 1

Le Rendez-vous

Ouf ! Il y a du monde icitte, à soir. Je vois Ti-Jos pis Pierre à côté des canots.
Ils sont des meilleurs amis depuis leur voyage l’année dernière.
Survivre des dangers ensemble, ça crée des amitiés fortes. Pis ça, c’était un des pires voyages, ça.
Ils en ont perdu deux : un mort noyé, l’autre le cou cassé pendant un portage.
Je sais pas comment ils ont fait pour ce rendre icitte dans un morceau.
J’étais sûre que Ti-Jos allait arrêter après ce voyage-là. Il était en mesure de le faire ; son contrat était fini.
Mais non, il y en a qui aiment ça l’aventure d’être engagé. Mon Jacques est comme ça.
Bonyenne, j’aimerais qui reste à maison mon petit. Pu si petit que ça, mon plus jeune.
On me disait qu’il était revenu aujourd’hui mais je le vois nul part. Oh, c’est-tu lui à côté du feu ?
Ah, il parle à la jeune Crie qui est venue avec sa famille vendre du pemmican au fort. Elle est pas mal belle.
Ça ferait des beaux petits-enfants, ces deux-là.
Je me demande si avoir une belle jeune femme qui l’attend l’encouragerait, mon Jacques, à rester à maison…
Je sais que ça paie bien mais ça vaut pas sa vie, quand même !
Oh oui ! On sort des instruments ! Arrêtez de jacasser, vous-autres. C’est le temps de danser et chanter.
Ouein, ouein. Je sais que vous avez plein de choses à vous dire et que ça fait longtemps que vous vous êtes pas vu mais y’en a icitte qui attendent
depuis un bon bout de temps pour des bons partenaires avec qui danser.
Pis, si vous avez remarqué, il y a du monde venu de partout pour faire la traite.
Mais bientôt, on va partir à la chasse au bison de l’automne, pis il n’aura plus de trous pour une secousse.
J’aime ben ça quand tout le monde se rencontre au fort. Ça fait comme la fête du jour de l’an plus qu’une fois par année !
Wôô! Yâ dju mond isitte aswerre. J’wè Ti-Jos pi Pierre a kôti di kanou.
Depwi leu darnyé wéyaj l’anni pâssi, sonta di bein bon z’ami. Kan sa survi di danji ansanb, sa fa di z’amichyé bein forte.
Pi sâ, sta ein di pire wéyaj, sâ. Y n’ava pardju deu : ein, yé morre nwèyé, l’ôt, y si kâssi l’kou pandan ein portaj.
Shé pâ koman ksa lâ fette pour arrivi isitte dan ein morsô. Sh’ta sur ke Ti-Jos l’ita pour arrêti apra s’wéyaj-lâ.
Mé non. Y nâ ksa l’emme sâ l’avanchur di wéyaji.
Mon Jacques li parèye. Bonyenne, j’emmera ke mon pchi resse a mizon.
Mé mon pluss jenne li pu si pchi ksâ. Sa ma dji ki l’ita r’v’nu back ojordjwi mé j’lâ pâ vu nulparre. Oh!
Si tchu lwi a kôti dju feu? Ah! Y parl a la jenne Crie ke lâ v’nu avek sa faméye pour vand dju pemmikan ô forre.
A li pâ mal belle. Sa f’ra di bô pchi-zanfan, si deu-lâ.
J’ma d’mand si mon Jacques, sa l’ankourajra a resti a mizon si y’arra enne belle jenne famme ke l’attan.
J’sé ksa pèye bein mé, sa vô kan mêm pâ sa vi.
A wè. Sa sor la muzik. Arrêti d’parli vouzôt. Si l’tan d’dansi pi shanti. Wè,wè.
J’sé ksa bein di z’aferre a djirre, pi sa fa lontan ksa sé pâ vu, mé y nâ isitte ksa l’attan depwi lontan pour trouvi dju mond avek ki dansi.
Pi, sa lâ tedbein vu, ke lâ dju mond k’ita v’nu di toupartou, pour ferre la trette.
Pi didan-lâ, mé, dan pâ gran tan, sa vâ parchir pour la shasse ô boflô de l’automne, pi y’aura pu d’senne pour enne bonne secousse.
J’emme bein sâ kan toul’mond y s’rankont ô forre. S’kom la fêt d’la fête du jour de l’an, pluss k’enne fwè par anni.