chapitres 2
Une mère métisse près du fort
La vie domestique d’une famille métisse près du fort était très occupée! Le fonctionnement d’un ménage à l’automne exigeait de nombreuses tâches, de la récolte des cultures et de la vérification des pièges à la chasse au bison et au commerce des marchandises au fort. Et bien sûr, il y avait toujours du lavage à faire! Certaines choses ne changent jamais!
Quand vous partez par portes d’entrée du fort, marchez environ 10 à 20 mètres vers la colline devant vous (au sud). Dirigez votre appareil vers la colline pour voir la propriété Métis.
Les Métis de la Rivière-Rouge constituent une nation unique. Nés dans un ensemble de circonstances économiques, sociales et politiques particulières, ils ont passé d’un groupe de personnes qui partageaient une histoire et des coutumes fondées sur le territoire à une nation qui a exercé un pouvoir immense au cours du XIXe siècle. De façon générale (mais pas toujours), les Métis étaient les descendants de manœuvres, commis et associés français, écossais et anglais et de femmes Anishinaabe, Ininew (Moskégons), Nacoda (Assiniboines) et Nehiyâw (Cris des plaines). Lorsque leurs contrats étaient échus, le hommes avaient un choix : signer un nouveau contrat ou prendre leur retraite à titre de citoyen et demeurer dans l’Ouest avec leur famille. Ils pouvaient également retourner en Angleterre, en Écosse, aux États-Unis, au Haut-Canada ou au Bas-Canada avec leur famille, ou abandonner entièrement cette dernière. Ceux qui choisirent de rester avec leurs épouses autochtones et leurs enfants devinrent les géniteurs des Métis de la Rivière-Rouge.
Du milieu à la fin du XVIIIe siècle, la région de la rivière Rouge a connu l’arrivée d’un filet de commerçants français indépendants qui ont établi de petits postes de traite des fourrures de martre et de castor. Ces commerçants s’établissaient parfois pour quelques années, mais bon nombre d’entre eux demeurèrent sur place. Les comptes-rendus des activités de ces hommes et de leurs postes sont peu nombreux, à l’exception des plaintes des commissionnaires de la Compagnie de la baie d’Hudson (CBH) : les intrus perturbaient les réseaux commerciaux sur lesquels la CBH se fiait pour l’apport de fourrures à la baie d’Hudson. Néanmoins, certains commerçants sont restés, se sont mariés dans les communautés autochtones et ont construit de petites maisons poteaux-sur-sole d’une seule pièce (au moins selon les normes des observateurs européens). Ils cultivaient aussi le terre pour produire des pommes de terre et du maïs et ils plantaient, entretenaient et récoltaient même du riz sauvage dans la région d’entre-les-lacs. Il n’était pas surprenant qu’ils complètent leur régime alimentaire avec la chasse et la pêche et qu’ils vendent l’excédent aux entreprises de traite des fourrures qui avaient besoin de provisions. Malgré l’importance du pemmican pour les entreprises, la chasse et la pêche pour de la chair fraîche sur une petite échelle étaient des activités très prisées, en particulier pour les associés et les commis qui hivernaient et qui se fatiguaient rapidement des aliments en conserve.
Le mode de vie des Métis était très saisonnier et dépendait des migrations des animaux qu’ils chassaient et des variations des conditions climatiques. Leur proximité sociale et physique aux communautés des Premières Nations leur donnait un accès à des réseaux commerciaux et leur familiarité avec les entreprises européennes et leurs motivations faisait d’eux une nouvelle force puissante dans les Prairies. Ayant appris de leurs mères à chasser, pêcher, ravitailler et cultiver la terre, certains jeunes hommes métis étaient en mesure de profiter des intérêts de leurs pères en infiltrant leurs cercles sociaux et en acquérant du capital social et économique au sein des entreprises dans la colonie de la rivière Rouge et au-delà, dans des lieux tels que le Bas-Canada et le Royaume-Uni.
La Compagnie du Nord-Ouest (CNO) a forgé des liens étroits avec la nation métisse émergente au confluent des rivières Rouge et Assiniboine. À l’occasion, la CNO donnait en sous-traitance à la population croissante certaines tâches telles que l’affrètement de marchandises et de provisions et avec le temps, plusieurs Métis occupèrent des postes d’autorité dans les rangs de l’entreprise. Ces hommes étaient habituellement les fils des commis ou des associés de la CNO qui avaient été éduqués à Montréal ou, dans des cas exceptionnels, en Europe. Cutberth Grant fils était l’un de ces hommes qui travaillaient au fort Gibraltar et plus important encore, il est devenu un chef de file des Métis de la colonie de la rivière Rouge.
À la suite des chasses au bison, les Métis étaient également en mesure d’utiliser leurs réseaux commerciaux pour établir des systèmes de roulage et d’affrètement qui demeurèrent actifs jusque vers la fin du XIXe siècle. Cela leur a permis de créer de nouvelles relations avec les Américains en se rendant plus au sud de la vallée de la Pembina, loin de la portée du monopole de la (CBH). Cela devait tôt ou tard causer un nouveau conflit entre la CBH et les Métis qui s’est terminé par le procès de Guillaume Sayer, un marchand indépendant qui était accusé de commercer en enfreignant le monopole de la CBH. Le procès ne se termina pas par un verdict de culpabilité, mais par un acquittement, car les amis et la famille de Sayer arrivèrent à l’extérieur du tribunal avec des armes à feu. Grâce à cette victoire, les Métis ont démontré encore une fois qu’ils étaient des fils essentiels du tissu social à la rivière Rouge.
Bienvenue, bienvenue ! J’vas m’excuser d’avance. C’est ben occupé icitte à ce temps-ci de l’année. |
J’sais pas pourquoi toute semble arriver à même temps. Excusez-moi un moment. |
Angélique ! Poigne ton frère pis allez au jardin cueillir le maïs au plus sacrant ; j’suis pas mal sûre qui va mouiller cet après-midi. |
Ah, les jeunes d’aujourd’hui. Ils veulent toujours nous donner du fils à retordre. Dans mon temps, on disait |
« Oui, Maman. Tout de suite, Maman. » Ben, fallait ben. Y’avait juste nous autres pis Maman. |
Papa était engagé de la Compagnie. C’est fou, hein ? Je m’étais décidée que j’allais pas vivre comme ça quand je serais grande. |
Pis cossé qui arrive ? J’tombe amoureuse d’un Voyageur, moé itou! |
Au moins quand qu’il part, on n’est pas laissées seules, il a plus de familles qui se sont établies dans les alentours à cause du fort. |
Le fort achète du maïs, des patates, du poisson, du riz sauvage pi d’la viande fraiche qu’on chasse. |
Les crédits qu’ils nous donnent pour ça, on les dépense sur des choses comme des couvertures, des bonnes scies, du thé fort pi du sucre. |
Pi, faut pas oublier les chasses au bison ! François ! vas voir nos trappes. On a besoin d’une couple de lapins pour souper. |
Je te dis que c’est le temps qu’on aille à chasse d’automne. Nos réserves sont pas mal finies. |
Heureusement que mon Jacques est revenu saint et sauf de son premier gros voyage. Il va être capable de faire la chasse. |
C’est pas le meilleur tireur, mais il est bon cavalier, mon Jacques. J’aime mieux le voir à cheval que dans un canot. |
Bon, cossé qui faut faire pour préparer la chasse ? J’devrais demander à mes voisins Nacoda s’ils ont vu des bisons. |
Oh Angélique, oublie pas d’aller chercher le linge sale au fort. |
Je sais que j’ai dit qui va mouiller, mais on peut bien les laver pendant qui mouille pis les étendre à sécher une fois que ça arrête. |
Crime, j’avais oublié qu’il faut que j’aille faire le ménage au fort. |
Bonyenne que je suis fatiguée. Des fois, je regrette pas l’arrivée de l’hiver. |
Au moins, je dors un peu pendant cette saison-là, pi on a le temps de se rencontrer. |
La récolte c’t’année a été pas mal bonne, on a assez de crédit pour acheter notre thé… tu reviendras au temps des fêtes pi on prendra une tasse ensemble. |
Beinv’nu, beinv’nu. Ma m’ixkuzi toutte switte. Si bein okupi a stan-sitte d’l’anni. |
Shé pâ pourkwè mé, toutte arrive an mêm tan, on djira. Scuzi-mwé, shré pâ lontan. |
Angélique ! Pâgne ton frérre pi alli ramâssi l’blédeinde dan l’jardein, ô plu sakran. Shu pâ mal sartenne k’apra-midji, y vâ mouyi. |
Ahh ! li jenne d’ojordjwi. Sa veu toultan no danni d’la mizerre. Dan mon tan, on djiza : « Wè Mâman, Touswitte Mâman. » |
Falla bein. Y’ava yeink Mâman pi nouzôt. Pâpa l’ita ein angaji par la Konpagni. |
Mé si bêt, hein ? J’ava disidi ke sh’ta pâ pour viv dimêm kan sh’ra grande. Pi kousé k’y’arrive ? |
Mwé itou, sh’tonb an amour avek ein Wéyajeur. Mé ô mwein, kan y parre, on li pâ lessi par nouzôt mêm, |
a kouze ki lâ an mass pluss di faméye, ke l’ava mouvi alantour dju forre. |
Le forre ashette dju blédeinde, di patatte, dju pwèsson, dju ri sâvaj pi d’la vyand frésh kon shass. |
Y nô danne di krédji pour sâ, pi on li dipans sur di z’aferre kom di kouvarchur, di bonne si, dju bon ti forre pi dju suk. Pi, fô pâ oubliyi la shass ô boflô ! |
Franswè, vâ chèki nô trap. Sa lâ bezwein di kuk lyève pour soupi. |
Sh’ti dji ki li tan d’alli a shass d’ôtonne. Lâ kizman fini toutte nô risarv. Enne bonne shans ke mon Jacques li r’vnu back an vi d’son premyé grô wéyaj. |
Y vâ êt kapab ferre la shass. Spâ lwi ke tchire li myeu mé, li bon su ein sh’fal, mon Jacques. J’emme myeu l’werre a sh’fal ke dan ein kanou. |
Si kwè ke fô ferre pour êt pra pour la shass ? Ma dimandi a mi wèzein Nacoda si y l’ava vu di boflô. |
Ohh Angélique, oubli pâ d’alli sharshi li leinj sal ô forre. Shé ke ja dji ke va mouyi, mé, sa peu li lavi pandan ksa mouye pi li z’itande pour chessi kan sa vâ arrêti. |
Krimme, j’ava oubliyi ki fô k’jaye nitwèyi ô forre. |
Bonyenne shu fachigi. Di fwé, sa m’fa ryein ke l’iverre s’an vyein. Ô mwein, j’dorre ein pchi brein pluss s’tan -lâ, pi sa lâ l’tan di swerre. |
Pi la rikolt lita pâ pire s’t’anni ; sa lâ assi krédji pour ashti notte ti… Tchu r’vyeindra back pandan li fêt pi sa prandrâ enne tass ansanb. |